#15 Une guerre globale qui ne dit pas son nom?

Nous sommes entrés dans une nouvelle ère géopolitique, qui a des relents de guerre froide avec des conflits proxys (Ukraine, Gaza), une opposition idéologique entre démocratie et authoritarisme fondés sur une internationale des nationalismes de droite.

Mais nous sommes en 2024, et les changements technologiques conduisent à des affrontements souterrains bien plus variés, sournois et dangereux que dans les années 1950 et 1960.

Il y a d’abord l’interdépendance mondiale en termes d’internet, qui à la fois décuple les capacités d’influence idéologique sincère, les mouvements d’opinion spontanés, la propagande d’état, les manipulations de l’opinion (Black lives matter en partie supporté par la Russie), mais aussi qui permet des opérations quasi-militaires sur des infrastructures ou l’économie de certains pays à travers le piratage (Ukraine, Iran).

Il y a aussi l’héritage de la période anti- Al Qaida et islamisme radical, où les démocraties occidentales ont légitimé beaucoup d’opérations sous prétexte de lutte contre le terrorisme. Maintenant cette même rhétorique justificatrice de la lutte anti-terroriste est utilisée par les régimes autoritaires comme la Chine avec les Ouïghours ou la Russie avec les résistants ukrainiens, ou encore Israël et le Hamas. Même si personne n’est dupe, les démocraties occidentales ont plus de difficultés à justifier leur opposition.

On assiste aussi à la reconstitution ou renforcement des blocs, avec adhésion à l’OTAN ou à l’UE, et des alliances renouvelées entre la Russie, la Chine et l’extension du groupe des BRICS.

Macron annonce le ré-armement de la France. L’Ukraine montre que les Etats actuels ne sont pas prêts pour une guerre de longue durée, sur de multiples fronts. Il semble que les politiques ont oublié que la guerre est une énorme force de destruction, et que celui qui a les capacités de production les plus importantes est celui qui a le plus de chances de l’emporter. Les Etats-Unis ont fait pencher la balance du côté de la démocratie dans les deux guerres mondiales grâce à leur économie. Qu’arrivera-t-il si Trump est réélu?

La guerre froide 2.0 risque-t-elle de devenir une guerre chaude, globale et totale?

Totale, comme les deux précédentes guerres, par la mobilisation de toute la société et l’appareil économique

Globale, plutôt que mondiale, parce qu’elle se jouera (se joue déjà?) aussi bien entre pays et alliances, qu’au sein même de chaque nation, entre pro-démocratie libérale et nationalistes autoritaires et fachos.

Guerre qui ne dit pas son nom, parce que les moyens engagés ne sont pas (exclusivement ou même majoritairement) militaires. Guerre tout de même, parce que les affrontements visent la soumission, l’absorption ou l’annihilation de l’autre camp. Parce que le dialogue est rompu, le compromis impossible, la simple co-existence une menace vitale.

Mais comme toute guerre qui ne dit pas son nom, cet état de fait est là pour durer, avec aucun moyen clair de mesurer l’avantage des uns ou des autres, pas de cartes d’état-major avec état des forces en présence ou de lignes de front clairement établies. Elle pourrait même paraître insoluble, mais je pense qu’un camp finira par faire pencher la balance d’un côté ou d’un autre, décidant de ce fait d’un nouvel ordre mondial, à la “post world war 2”, au moins pour un temps.

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